Quand Merritt White a fondé ReCycles, à Greensboro en Caroline du Nord, il s’en tenait aux vélos les plus courants et aux réparations toutes simples dont avaient besoin les cyclistes du coin. Une stratégie gagnante, si bien que quelques années plus tard, quand il a voulu vendre du Rocky Mountain, il avait peine à trouver la place pour sa nouvelle et reluisante marchandise.
« C’était vraiment serré, se rappelle-t-il, mais je me suis dit : allons-y quand même! »
Les années se sont succédé, les marques de vélo aussi, mais Rocky Mountain est restée une constante. Même que, lorsqu’il a songé à fermer boutique pour ne garder que l’atelier, Merritt a changé d’avis à cause, figurez-vous, de la gamme Powerplay.
« J’adore le PowerPlay », explique-t-il. Ce n’est pas le premier vélo de montagne électrique qu’il a essayé, mais son expérience des autres marques et du décalage de leur assistance motorisée lui avaient laissé une bien mauvaise impression.
« Je suis parti pour un tour avec un vélo d’une autre marque qui avait ce beau moteur tout impressionnant et, ouf, ça lui prenait une bonne seconde pour s’enclencher et encore une autre pour s’arrêter. Je me suis retrouvé à descendre une haute paroi rocheuse sur la roue avant… Après ça, fini, j’ai reviré de bord! Je me souviens, j’ai dit au représentant : “Écoute, je sais comment manœuvrer un vélo, OK? Mais ce vélo, c’est quasiment lui qui me menait. C’est fou – c’est en plein pour ça que le monde déteste les modèles électriques.” »
Mais voilà que quelques semaines après, Merritt a assisté au lancement du Powerplay en Arizona.
« J’ai fait un essai et wow! Ça a tout changé pour moi. Wade, Jesse et moi, on a roulé ensemble et j’ai trippé. J’ai passé une grosse commande, et vous connaissez la suite. »
En effet, depuis, ReCycles vend ses vélos Powerplay plus vite que Merritt arrive à les commander.
Si, en 2021, les vélos de montagne électriques sont sur toutes les lèvres et gonflent le chiffre d’affaires de sa boutique, l’entrepreneur n’oublie pas ses origines modestes et la vocation communautaire qui l’a d’abord animé.
ReCycles, à la base, c’était un atelier de réparation sans prétention à proximité du campus de Greensboro. La croissance a rapidement suivi – en taille et en popularité –, menant à l’expansion de la boutique d’abord dans le sous-sol du bâtiment, puis dans les locaux voisins.
C’est à la même période que Merritt s’est adjoint les services d’un talentueux ami peintre du coin, qu’il surnomme affectueusement « Art Boy ». Spécialiste de la peinture de motos, ce dernier a bien voulu se prêter au jeu, à la suite d’une baisse de la demande qui a suivi la récession économique. Et en deux temps trois mouvements, l’incroyable qualité du travail d’Art Boy a fait la réputation de ReCycles aux côtés de l’imagination débordante de Merritt pour produire des cadres sur mesure. Ainsi, non seulement on pouvait se faire construire un bolide d’enfer, mais on pouvait aussi le faire peindre d’un design 100 % original et avoir un casque assorti.
« Ce qu’on faisait était assez cool, j’imagine », euphémise Merritt, qui s’était fait des clients réguliers d’aussi loin que l’Oregon, « mais bon, on a surtout laissé les affaires se développer naturellement. » Lorsque la demande a rebondi dans son créneau, Art Boy a repris du service en peinture de motos, mais il continue d’apporter des retouches aux vélos haut de gamme qui sortent de l’atelier.
Mais au-delà de la construction d’engins avant-gardistes et complètement fous, l’activité principale de ReCycles est fidèle à ses racines : monter des vélos simples et abordables pour les étudiants et les cyclistes en tout genre de Greensboro.
Merritt a vu d’autres boutiques, et des plus grandes de surcroît, refuser de servir ses concitoyens plus démunis. Devant une telle scène, il se souvient s’être dit : « Ce pauvre type, il a besoin d’un vélo pour gagner son pain, pour toucher son petit 10 $ par jour… il en a bien plus besoin que ce médecin aux grands airs qui va se plaindre que le sien n’est pas prêt assez vite ». C’est cette réflexion même – cette réalité – qui a été sa principale motivation pour ouvrir sa boutique au début des années 2000.
Oui c’est toujours emballant de parler de vélos de construction ultraperfectionnée, de peinture personnalisée, de passionnés qui veulent se fabriquer un bolide à tout casser… Mais ce qui est super quand on parle avec Merritt, c’est de voir comment il arrive à équilibrer les deux piliers centraux de sa boutique pour en arriver à quelque chose de motivant, de bon pour sa communauté, et bien sûr, de trippant.
Comme le font les meilleures boutiques, celles qui sont vraiment accueillantes, l’espace créé par Merritt célèbre la beauté de ce véhicule à deux roues, dans toute sa simplicité comme dans toutes ses configurations les plus folles et épatantes. Pour notre homme, tout nous ramène au vélo.
« La vie ne nous donne pas les mêmes chances, mais nous sommes tous pareils en dedans. Tout le monde devrait pouvoir faire du vélo, pour la commodité comme pour le plaisir. »